Le sentiment d'impuissance ou le syndrome de Job

Publié le par GLAD

"L’impuissance naît quand le pouvoir brime le vouloir" (auteur inconnu)

Il est 2h du matin, mais je ne le sais pas encore… Je me prépare à naître, à sortir du nid douillet, seul endroit que j'ai connu depuis 8 mois et demi. Le cœur de maman bat plus fort que d'habitude… pourquoi? j' aperçois depuis ma loge une lumière verdâtre qui met en scène le ventre de ma mère. Il y a du bruit dehors et je ne me sens plus en sécurité. Que se passe-t-il? Je suis tellement coincé dans le ventre que je ne peux quasiment plus bouger. J'ai peur et j'ai du mal à respirer, un truc s'est noué autour de mon cou… et je ne peux rien faire… Puis soudain la lumière jaillit. J'entrevois depuis ma bulle aquatique une forme verte qui s'approche de moi avec un objet. J'ai peur… que me veut-il celui-là? je ne peux rien faire… La poche autour de moi éclate. J'ai froid… je ne peux rien faire. Deux grosses mains gluantes me prennent par le corps et m'obligent à sortir de ma cachette. Pourquoi? Je ne peux toujours rien faire. On m'enfile des tuyaux dans le nez, dans la bouche, je ne peux plus respirer. Je ne peux rien faire… on me pique avec une aiguille, on me couvre avec des pates rêches… je crie, c'est tout ce que j'ai trouvé pour dire que je n'apprécie pas… zut, ca ne sert à rien, personne ne m'écoute! Ensuite, c'est un moment de bonheur: j'entends à nouveau le souffle de maman, différemment mais je le reconnais. Je sens sa peau. C'est la même odeur. Puis elle m'offre à manger et c'est bon!... Plein de visages s'approchent de moi et ca me fait peur… je ne peux pas les éloigner. On me place dans une petite boite, tout seul et il y a beaucoup de bruits. Je m'endors d'épuisement à force de pleurer et pour oublier que je ne peux pas agir… il paraît que souvent dans ces moments-là les parents disent: oh, regarde comme il dort paisiblement!

 Prendre conscience à quel point un nouveau-né est impuissant relativisera peut-être un peu le sentiment d'impuissance que l'on vit en étant adulte: une situation difficile au travail, une relation de couple où l'on se sent victime, une maladie qui nous terrasse, un revers de fortune en ces temps de crise boursière, un incendie qui détruit tous nos biens, la perte d'un être cher ou encore le non-pardon d'une personne qui nous tient à cœur… quelques exemples de situations où l'on peut se sentir impuissant.

D'après une étude en milieu professionnel (cf article très intéressant  ici), le sentiment d'impuissance génère 3 types de réactions: la révolte, la détresse ou le désengagement total. Dans les trois types de réponses, le but ultime est de ne plus souffrir. Il peut être ressenti comme généré de l'intérieur (la personne se sent coupable et ressent une responsabilisation à outrance) ou de l'extérieur (tout ce qui arrive vient de l'extérieur et la personne ne s'en sent pas responsable: victimisation).

Dans la révolte, la manœuvre est de trouver rapidement et à court terme une solution de soulagement afin de reprendre au plus vite le contrôle directement ou indirectement sur les évènements ou les personnes que l'on peut ressentir comme injustes. On se sent livrer bataille contre un ennemi acharné, persuadé cependant qu'il aura le dessus. En gros, c'est se dire: Je refuse catégoriquement cette situation, je vais changer l'histoire (cf film "L'effet Papillon" d'Eric Bress et J. Mackye Gruber et sorti en 2004). Reprendre à tout prix les rennes de sa vie, le plus vite possible. Avantages: la souffrance est plus courte.

Dans la détresse, le sentiment d'impuissance est écrasant. On se sent tout petit face à un problème immense, insoluble. En gros, c'est se dire: Je suis débordé, je ne sais plus que faire, je ne peux rien faire, à quoi bon...Les personnes "impliquées", responsables à nos yeux, nous semblent des persécuteurs, des bourreaux sans cœur et c'est très vite fait de glisser dans la victimisation (je n'y suis pour rien, c'est à cause de lui, d'elle).Celle-ci, mal comprise par notre entourage, fait fuir ce genre de personnes… c'est l'isolement ou alors le rôle de bouc-émissaire... Et la boule de neige grandit…

Dans le désengagement, le sentiment d'impuissance doit être mis à distance émotionnel du sujet, question de survie. En gros, c'est se dire: Je m'en fous, cela ne me touche plus, tant pis, ca passera... L'acceptation fataliste de la situation ou le renoncement volontaire à livrer bataille permet cependant à la personne d'avoir une vue d'ensemble (que n'a pas celle qui réagit dans la révolte par exemple). Mais cette distance augmente également la mauvaise estime de soi et la tendance à la dépression…

Au cours de mes lectures sur le sujet, j'ai lu ceci: Un besoin inassouvi signifie de la douleur. Et l'incapacité de réagir face à la douleur signifie l'impuissance.

Alors… que faire contre l'impuissance? Quel paradoxe… Faire alors qu'il n'y a justement rien à faire!

C'est là que j'en viens au syndrome de Job, comme je l'appelle: Job, cet homme riche de tous les biens terrestres, d'une vie heureuse en couple et en famille, d'une excellente réputation et d'un respect inébranlable. Sans compter sa dévotion à son Dieu si fervente et fidèle… Il avait bien la situation en main n'est-ce pas?

Pourtant, il a simplement suffi d'un bête pari entre Dieu et Satan pour que toute sa belle confiance et son assurance de maitrise de sa vie brûle en un clin d'œil comme un fétu de paille dans un brasier chauffé à blanc…

L'histoire incroyable de Job, "victime" d'un deal entre le Créateur et un archange, a pour vertu de bien comprendre le chemin de sortie du sentiment d'impuissance: En deux mots, Satan met au défi Dieu: l'homme si "intègre et droit" dont tu parles ne l'est que pour son intérêt propre. Mais regarde comment il réagit quand tu lui enlève tous ses privilèges! Tu verras bien s'il ne te maudit pas! (Job 1, 8 à 11; 2, 2 à 5).

Et Dieu permit à Satan de lui ôter tous ses biens, sa famille, sa fortune et même sa santé, mais Il ne lui permit pas de lui enlever la vie (Job 1, 12 et 2,6), tellement il avait confiance en son bien-aimé. Et Job a commencé sa longue descente aux enfers. Il a tout perdu. Tout et tous. Il se retrouve finalement seul, endeuillé, malade, sdf et la risée même de ses "amis".

Job est humain. Il a vécu tous les affres liés au sentiment d'impuissance, jusqu'à son paroxysme: révolte, détresse, angoisse, amertume, dépression, sentiment d'abandon, solitude, isolement, famine, maladie, douleurs psychiques et physiques, sentiment d'injustice, remise en question profonde, allant jusqu'à maudire le jour de sa naissance et crier à Dieu sa rage et son incompréhension. Franchement, il ne devait pas en mener large dans ces temps très difficiles (et dire qu'une grande partie du monde aujourd'hui vit exactement cette situation au quotidien, sans que personne ne s'en soucie ou presque…).

Pourtant Job avait une botte secrète: Il gardait fermement dans son cœur la confiance que Dieu, celui qu'il connaissait depuis toujours, se rendrait compte de l'"erreur" et lui rendrait justice un jour et c'est bel et bien ce qu'il fit (Job 42.10 et suiv). Alors que tous et tout autour de lui l'incitait à abandonner courage et à accuser Dieu de tous ses malheurs, Job garda la confiance en Dieu (et dire qu'une grande partie des chrétiens du monde vivent aujourd'hui de la même foi, malgré l'adversité qu'on ne peut ici, dans nos pays bien douillets, imaginer…).

Le seul secret de Job: "Je reconnais que Tu peux tout et que rien ne s'oppose à Ta volonté… j'ai parlé sans comprendre… Mon oreille avait entendu parler de toi, maintenant, mon œil t'a vu (Job 42, 2, 3b, 5). C'est justement face à une situation qui nous dépasse totalement et lorsqu'on est mis à l'épreuve du sentiment d'impuissance que Dieu se révèle à nos yeux… véritablement.

Je reconnais que tu peux tout… en cela, je reconnais que je ne peux rien d'autre que te faire confiance
Rien ne s'oppose à Ta volonté… même pas la mienne J'ai parlé sans comprendre… "les choses cachés sont à Dieu" (Deut. 29,29)
Mon oreille avait entendu parlé de toi… j'avais eu vent de ta puissance…
Maintenant mon œil te voit… maintenant je l'ai véritablement expérimentée pour moi.

Alors ami qui traverse le désert du syndrome de Job, tu as le choix:
Soit tu traverses les saisons orchestrés par l'impuissance (révolte, détresse et désengagement)
Soit tu décides fermement de reconnaître qui est véritablement le maître de ta vie, tu acceptes que tu n'as pas toutes les cartes en main (mais lui oui) et que tu es prêt à voir Sa puissance dans ta vie…
Je ne dis pas que tu ne vivras pas la révolte, la détresse ou le renoncement… mais en arrière-plan, tu auras remis ta destinée dans les mains de Celui qui t'a créé et qui accomplira sans aucun doute ses plans emprunts de bonté, de bienveillance, d'amour, de douceur, de paix, de joie, de patience. (Gal 5,22).

En bref, tu lui feras confiance.

La question n'est plus de se dire: que faire? Mais plutôt: Que va-t-Il faire? Ou quand verrais-je agir Dieu dans ma vie?

N'est-ce pas là aussi une question de maitrise… non plus du monde qui nous entoure, mais… de soi?

Contre le sentiment d'impuissance, Dieu nous donne une solution très pragmatique:

"C'est dans le calme et la confiance que se trouve ta force" Esaïe 30, 15.

On a un pouvoir simplissime sur l'impuissance. Choisir de rester calme face à l'adversité et faire confiance pleinement à Dieu. Ce pouvoir est entre nos mains, à nous de le prendre...

Suggestion de prière:
Seigneur, je ne comprends pas tout ce qui m'arrive en ce moment et j'ai mal.
Je me sens impuissant(e), découragé(e) , abandonné(e) , et c'est un moment très dur.
Parfois, j'aurai envie de tout envoyer balader, me révolter, me battre comme Don Quichotte contre ses moulins… Parfois, j'aurai envie de crier ma détresse et que quelqu'un m'entende…
Parfois, j'aurai envie de baisser les bras et subir, sans espoir de changement…
Mais toi, tu me dis que j'ai les moyens de changer ce sentiment, tu me dis que j'ai de la force!
Toi, tu connais toutes mes circonstances, mes soupirs, mes incompréhensions
Toi, tu connais le début et la fin de mon histoire et je sais que tu veux mon bien…
Et quand tu dis que ma force, c'est ma confiance en toi dans le calme, je prends conscience que je peux agir, je peux choisir ces attitudes et cela m'apaise beaucoup, merci Seigneur.
Alors simplement dans ce moment de partage avec toi, je m'en remets entièrement à toi et je décide de rester calme face à la tempête qui m'envahit et m'environne.
Tu es dans la barque et tu contrôles la situation, je le crois vraiment Seigneur.
Merci parce qu'avec toi, il y a toujours une solution à portée de ma main.
Merci de me faire participer à ton œuvre! Je peux tout par celui qui me fortifie!
Tu es merveilleux
Amen

GlàD

Publié dans Les sens de la Vie

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